« Nocturne » : le nouveau disque magistral d’une « bande de potes »
« Nocturne » : le nouveau disque magistral d’une « bande de potes »
Ballaké Sissoko, Roger Raspail, Vincent Segal… En invitant des pointures et amis à jouer en acoustique autour de lui, David Walters met un peu de douceur dans un monde de bruit.
Certains grands albums arrivent par accident. Sans injonction de maison de disques, sans calcul dicté par l’ambition ou le tiroir-caisse. « Nocturne » est de ceux-là.
Et dès ses premières notes – complainte grave du violoncelle, pulsation nerveuse des percussions, envolée de kora -, il fait entendre sa différence.
Objet doux, élégant, qui prend des chemins de traverse à l’heure où les titres les plus streamés sont électrisés, ultra-produits et ultra-compressés,
passés et repassés dans des machines qui en font des produits lisses, prêts à consommer.
« Nocturne » n’aurait pu naître sans la pandémie, son flot de restrictions et de morts.
Le premier titre, donc, « Papa Kossa », est d’ailleurs un hommage à Manu Dibango, emporté le 24 mars par le Covid-19.
« Le confinement m’a posé, m’a fait peur, la période a tout interrompu,
se souvient David Walters, « griot créole », infatigable voyageur qui avalait les continents au fil de ses albums et émissions télé,
que la pandémie a immobilisé à Marseille, sa ville d’adoption.
« À un moment, j’ai repris ma guitare classique. Je n’avais plus envie de toucher aux machines.
J’ai fait un live sur les réseaux avec Vincent, puis deux, et l’idée est venue de faire une session acoustique, sans filet. »
Une « bande de potes »
David Walters ne connaît pas personnellement Ballaké Sissoko, mais il savoure depuis longtemps la virtuosité du maître malien de la kora.
« Chamber Music [duo de Vincent Ségal au violoncelle et Ballaké Sissoko à la kora, ndlr] est un de mes albums de chevet, c’est avec lui que j’ai bordé mon fils pendant longtemps, raconte-t-il.
Ballaké a rapidement accepté de se lancer dans l’aventure avec nous.
Puis j’ai demandé au percussionniste Roger Raspail de nous rejoindre.
C’était comme de se retrouver dans une famille, ou de constituer une bande de potes.
On a planifié une date pour une session studio…
Et là, en sortant mon grand agenda papier, je me suis rendu compte qu’il restait seulement deux mois avant l’enregistrement, alors que je n’avais composé que trois morceaux ! »
Il part alors s’isoler une dizaine de jours dans une cabane près de l’océan.
Certaines compositions, infusées dans l’eau de mer, en gardent encore les notes salées, douces-amères, tel le titre « Carioca », qui s’inspire du bateau qu’il loue chaque été pour s’évader.
D’autres ballades, comme « Baby Go », viennent bercer le cœur, et sont une réponse au moment cauchemardesque que fut l’annonce du confinement.