Rova, du caviar made in Madagascar
Rova, du caviar made in Madagascar
Il fallait y penser : au nord d’Antananarivo, des entrepreneurs français se sont lancés dans la production d’œufs d’esturgeon, désormais exportés sous la marque Rova vers des hôtels et restaurants de luxe.
Ses rives sont autant de refuges pour les habitants d’Antananarivo qui ont la chance de pouvoir échapper au stress de la capitale.
Cerné de petites collines, le lac artificiel de Mantasoa, à 60 kilomètres au nord de Tana,
est devenu un lieu de villégiature privilégié pour l’élite politique et économique de la Grande Île.
Luxe, calme, volupté et, désormais, caviar.
C’est dans cet écrin de nature, à 1 400 mètres d’altitude, que les Français Delphyne Dabezies Guiraud,
son époux Christophe et leur associé Alexandre Guerrier ont installé leur élevage d’esturgeons.
« Il n’y a pas d’industrie, donc pas de pollution. L’eau du lac, principalement alimenté par les pluies,
est d’une grande pureté », explique la fondatrice de la ferme Acipenser,
du nom de cette famille de poisson reconnaissable à ses plaques osseuses et à son rostre plat,
dont les œufs ont fait les grandes heures de la Russie impériale.
L’exploitation piscicole des trois Français est l’une des deux seules à produire du caviar dans l’hémisphère Sud,
avec celle de Baygorria, en Uruguay.
Et désormais l’un des fleurons du savoir-faire malgache.
Montée en puissance
Établis depuis la fin des années 1990 dans le pays où ils avaient déjà fondé Akanjo,
une entreprise de confection de prêt-à-porter de luxe, les trois associés décident de se lancer en 2009,
après avoir regardé un documentaire.
« Christophe et Alexandre ont cherché pendant plusieurs mois un site adapté avant d’identifier le potentiel du lac, où nous avions l’habitude de venir en week-end »,
se souvient Delphyne Dabezies.
D’abord uniquement installée à terre autour de 19 bassins creusés le long d’un canal irriguant les rizières situées en contrebas du barrage,
l’exploitation a depuis colonisé le sud du vaste plan d’eau de 2 000 hectares.
Trente-quatre cages flottantes de 25 mètres de diamètre sont alignées sur trois rangées.
Les trois quadragénaires ont investi plus de 11 millions d’euros dans l’aventure et créé environ 200 emplois. « C’est Ahmad Ahmad,
qui a été ministre de la Pêche avant de devenir président de la CAF,
qui nous a donné les autorisations alors que personne ne connaissait cette activité à Madagascar », souligne l’entrepreneuse.
Sur les 80 000 femelles de l’élevage, environ 6 000, nées en 2013 et 2014,
sont désormais prêtes à produire.
Après une première récolte symbolique en 2017,
la ferme monte en puissance.
Plus de quatre tonnes de caviar ont pu être extraites des gonades (les poches d’œufs) des esturgeons l’an dernier, entre février et septembre.
« On prévoit d’en produire au moins 7 tonnes en 2020 pour un chiffre d’affaires compris entre 3 et 4 millions d’euros », anticipe Delphyne Dabezies.
L’opération prend tout au plus une dizaine de minutes dans le laboratoire de la ferme.
La femelle est incisée, puis le caviar est extrait de la poche, tamisé,
lavé deux fois, salé et brassé à la main, puis mis en boîte.